La révolution des pneus de route est en marche et je suis monté dans le train.
"La vieillesse est un naufrage" disait le grand Charles, et je n'y échappe pas. J'aurais aimé continuer de vivre heureux sur un vélo raide comme la justice et vif comme l'éclair, mais je dois me résoudre à faire quelques compromis pour préserver ma santé inexorablement déclinante.
Je pédale aussi vite qu'il y a dix ans, mais je souffre depuis quelques temps d'engourdissements des mains et de douleurs au scrotum (la couille gauche si vous préférez) après quelques heures passées en selle.
Je devais donc trouver davantage de confort sur mon vélo, qui est pourtant déjà très bon dans ce domaine.
Par chance une révolution est en marche dans le monde du vélo de route. On s'aperçoit qu'un pneu fin et surgonflé est non seulement inconfortable, mais il offre de moins bonnes performances qu'un plus gros pneu à plus basse pression.
Je pouvais donc caresser le rêve de gagner du confort tout en gardant, voire en améliorant, mes légendaires performances.
J'avais déjà franchi un cap au printemps en passant aux pneus de 28 mm et en descendant la pression autour de 5,5 bars. Mais le gain de confort n'étaient pas flagrant. Et je ne pouvais pas gonfler moins, de peur de pincer mes chambres à air à chaque nid de poule.
J'ai donc passé le cap la semaine dernière en commandant de nouvelles roues et pneus tubeless.
Soucieux de ne pas trop grever la masse de mon biclou, et soucieux également de briller socialement, j'ai acheté des roues en carbone. Après tout, ne dit-on pas qu'à 50 si tu n'as pas de roues carbone tu as raté ta vie ? (ou bien c'était un cadre titane... je ne me rappelle plus).
Après quelques hésitations j'ai commandé une paire de roues américaines sur un site de vélo discount allemand et une paire de pneus tubeless à la boutique de Jeff Bezos. Le tout pour à peine plus d'argent qu'un pacte enseignant (merci Gabriel !)
J'ai pris les mêmes pneus que j'avais sur mes anciennes roues alu, mais en version tubeless : des Continentaux en 28 mm.
J'évite de donner la marque des nouvelles roues, je ne voudrais pas graver dans le marbre de VTTnet des compliments sur un truc que j'ai testé une seule fois. Mais ça commence par un Z et ça se termine par deux PP.
J'ai reçu les roues quatre jours avant les pneus, ça m'a laissé le temps de les observer. Elles sont hyper larges par rapport à mes anciennes. Ca va permettre aux pneus de prendre leurs aises. Très légères et bien finies. J'ai pris un coup de stress en voyant que les flancs internes sont lisses. J'ai eu peur d'avoir pris des non-tubeless. Mais il paraît qu'il s'agit de la nouvelle technologie "Hookless" (Crochet moins) où le pneu vient juste s'appuyer sur le bord de la jante, sans y être vraiment accroché.
A cause de cela les jantes sont données pour une pression de 5 bars maxi, ça me parait peu, mais il paraît que c'est suffisant.
Elles semblent costaudes malgré leur poids plume. Elles sont d'ailleurs plébiscités par pas mal de gravelers (je viens d'inventer ce nom). Ca a été un argument de poids dans mon choix.
Après avoir reçu les pneus, je monte l'ensemble, non sans quelques péripéties. Par exemple monter le disque avant sur la roue arrière et chercher pendant 20 minutes pourquoi je n'arrive pas à la remonter sur le vélo...
Ce sont mes premiers tubeless. Je découvre les joies du liquide anti-crevaison en espérant n'avoir jamais à démonter le pneu avec un truc aussi dégueu à l'intérieur.
Je constate que les pneus Continentaux de 700x28 faisaient 28 mm de large sur les anciennes jantes, mais presque 30 mm sur les nouvelles jantes, à cause de leur largeur généreuse .
Je n'ai aucune idée à combien les gonfler. En tous cas j'oublie mon ancienne pression de 5,5 bars, vu que ces jantes explosent au dessus de 5 bars. En furetant sur l'internet je trouve un article qui donne des valeurs de 3,7 bar à l'avant et 3,9 bar à l'arrière pour mon poids. Le site indique également que le réglage de pression demande beaucoup de précision car le moindre écart change radicalement le comportement. Ca tombe bien, j'ai une pompe graduée au bar près. J'ajuste donc la pression autour de ces valeurs, au doigt mouillé.
L'ensemble est joli je trouve, ça donne un petit côté "professionnel" à mon vélo.
Au passage j'ai gagné 200 g sur mon vélo qui passe sous la barre symbolique des 8 kg (7,9 kg avec compteur et portes bidon).
Premiers tour de roue ce matin !
C'est toujours délicat le premier essai avec un aussi grand changement. Je cherche à la fois à ressentir précisément tout ce qui change, tout en gardant la tête froide devant l'enthousiasme de la nouveauté.
Déjà dans le couloir de l'immeuble je constate que la roue libre fait un sacré boucan. En plus il y a deux fois plus de cliquets que sur mes Fulcrum dont j'appréciais la discrétion. Ca se confirme sur la route: le piétons se retournent de loin en m'entendant arriver.
Anecdote : le détecteur des voitures au sol qui ouvre le portail de ma résidence ne réagit plus à mon vélo. Avec les jantes alu ça marchait, mais pas avec le carbone.
En attendant que le portail s'ouvre (avec la clef) un passant me dit qu'il trouve mon vélo super joli, ça fait toujours plaisir.
Finalement je me retrouve sur la route. J'ai choisi un circuit varié que je connais un peu: le tour du Môle.
Sur le plat bien lisse d'une piste cyclable la différence dynamique n'est pas flagrante. Les roues sont très aérodynamiques, mais je manque de finesse pour ressentir une différence. Au moins je ne fais pas d'embardées quand le vent souffle latéralement. J'avais un peu peur de cela avec les jantes relativement hautes (elles font environ 40 mm).
Dans les virages je ressens un léger flottement de l'arrière, sans doute à cause d'un manque de pression. Je retesterai avec un chouilla de bar en plus.
Dans les virages rapides la différence de comportement est flagrante. Grace aux pneus qui forment un bel arrondi sur la jante large, l'inclinaison du vélo est très progressive et le grip incroyable, quelque soit l'angle. C'est très rassurant, je ne sens pas du tout la limite d'adhérence arriver tôt et subitement comme avant. Ca permet de prendre les virage bien plus vite je pense.
Sur route défoncée le confort est incroyable. J'ai l'impression que toutes les routes ont été refaites. Même si les jantes sont sensées être plus raides, la souplesse des pneus gomme tous les petits chocs.
La frontière est ténue entre confort et mollesse, mais ici j'ai l'impression d'avoir gagné en confort sans aucune perte d'énergie, bien au contraire.
Côté dynamique je suis très agréablement surpris. Dans les relances sur un gros développement j'ai l'impression de retrouver la dynamique de mon anciens vélo taillé pour la compétition. Mon humble puissance est intégralement retransmise et le vélo ne ralenti pas dans les coups de cul montés en force. Ca donne presque l'impression d'être fort.
Je me surprends même en battant mon record dans Strava sur un long faux plat à ~4% passé en force sur la plaque (le grand plateau), et ce malgré une forme déclinante. Les pneus larges et peu gonflés roulent aussi bien, voire mieux que les anciens.
Au final le bilan est très positif. Je dois encore rouler sur d'autres terrains, les amener dans des grands cols et sur des longues sorties pour me faire un vrai avis. J'espère que la durabilité sera au rendez-vous.
Je n'ai pas ressenti la douleur aux poignets, c'est une bonne nouvelle.
Je peux dire déjà qu'il s'agit d'une sacrée révolution pour moi. Pendant des décennies j'ai roulé en pneus de 25 mm gonflés à 7 bar, et en un an j'ai gagné 3 mm de large et perdu 3 bar, en gagnant en performances. Le progrès une incroyable.
J'espère seulement que c'est le début d'une belle et longue histoire d'amour entres mes roues et moi.